jeudi 15 novembre 2012

Une journée bien agréable



Avant que le jour se lève nous voilà embarqués pour une journée spéciale, cap le Perthus. Après des achats aussi inutiles que dispendieux, sacrifiés au Dieu Consommation, nous voilà installés dans le temple de la bonne bouffe; chacun peut y trouver, pour un prix raisonnable de quoi satisfaire ses pulsions alimentaires. Cependant le clou de la journée, contre toute attente, fut la découverte du château forteresse de SALSES. Combien de fois sommes nous passés par l'autoroute à proximité sans nous arrêter, en regardant, dédaigneux, ces vestiges d'un autre âge, attirés par l'eldorado que nous croyions être l'Espagne! Il faut dire que de loin la «construction rasante» de cette forteresse n'est pas faite pour la mettre en valeur. Cette fois-ci, grâce à l'initiative de l'équipe du foyer Verdaguer et de sa guide efficace et chaleureuse, Colette Astier, nous l'avons découvert.

Bien qu'il soit écrasé au fond du vallon, le côté majestueux du site s'impose au visiteur. Ce château-forteresse se déploie sur 3 ha entourés d’un grand fossé. Les murs sont très épais et souvent en plans inclinés pour résister aux obus. Avant de poursuivre la visite laissez moi vous décrire l'allure de notre guide: Cheveux au vent, chemise défaite, parole facile, il exerçait une fascination sur son auditoire ; les dames se pâmaient et les messieurs étaient «espantés». Le bougre, à soixante «piges», est encore beau gosse. Son œil pétille; son timbre de voix, sa passion, en font un combattant qui défend le château de Salses avec des accents homériques. Ajoutez au tableau un gaillard aux allures de troisième ligne de rugby, droit dans ses bottes qui exècre toute forme de bureaucratie. C'est un conteur charmeur qui captive le chaland. Ainsi nous voilà transportés à travers les siècles dans l'histoire, surtout dramatique, de ce lieu de mémoire.

Cette forteresse fut érigée par des architectes espagnols sur ordre du roi d'Espagne pour contrôler la riche plaine du Roussillon; d'un côté la chaîne des Corbières, de l'autre l'étang, sur le seul lieu de passage obligé des envahisseurs. La tour centrale est une plate-forme imprenable et nous l'avons compris en suivant le guide.... Trois sources venant des Corbières ont été canalisées. Ces plans et ces canalisations sont encore un secret d'état aujourd'hui.. Pour faire fonctionner le fort il fallait disposer de 1700 soldats. Ce n'était pas un problème, la main d’œuvre était abondante. Même si d'aventure les attaquants franchissaient le premier rideau de remparts, un deuxième se dressait devant eux, défendu par des centaines de combattants. Et même si ce deuxième rideau était franchi, il fallait ensuite progresser dans des galeries étroites pour accéder au saint des saints, la tour centrale avec sa salle de commandement... L'assaillant était à découvert dans ses galeries étroites, sans lumière et dès qu'il avançait il était fauché par des tireurs en embuscade dans tous les recoins qui ne laissaient aucune chance aux malheureux combattants. C'était une souricière...
Un véritable charnier est enfoui dans les entrailles du château. Un train de fantômes parcourt, les nuits de pleine lune les galeries sinistres de ce lieu d'infortune. Près de 30000 morts sont ensevelis dans ce lit de misère. Si aujourd'hui on se plaint de l'incurie de nos dirigeants, il faut bien observer qu'au cours de l'histoire, nos ancêtres ont subis les pires vilenies pour satisfaire la volonté de puissance de quelques uns. Ne restons pas sur une perception tragique de l'histoire et admirons plutôt ces architectes qui ont su bâtir cette forteresse inexpugnable en captant l'eau des Corbières. Dans cette tâche immense ils furent conseillés par des hydrauliciens maures qui un peu plus tôt avaient conduit l'eau des montagnes au palais de l'Alhambra à Grenade. L'eau indispensable à toute place en état de siège était utilisée même pour les commodités des résidents. Salses disposait de lieux d'aisance, le tout relié avec les eaux de pluie à des égouts de grandes dimensions, qui se déversaient dans l'étang après avoir été filtrés par des charbons de bois. Grandeurs et décadences telle est la perception qui nous reste quand on songe aux drames qui se sont perpétrés sur ces lieux d'histoires.
La journée s'est terminée par la visite de la cave de Salses où de charmantes hôtesses nous ont fait déguster les vins ensoleillés du Roussillon.

Rédaction : Gérard CAUVI

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